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Hypnothérapie vs hypnose de spectacle : le combat inutile

J'entends trop souvent les hypnothérapeutes "cracher" sur les hypnotiseurs de spectacle sous prétexte que ceux-ci donneraient une « mauvaise image » de l'hypnose au grand public. Cette image mystérieuse et inquiétante serait, à en croire leur propos, une des raisons du manque de reconnaissance pour la pratique de l'hypnose et donc d'une trop faible affluence des clients dans leurs cabinets. À les entendre, beaucoup de clients potentiels s’enfuiraient à la simple mention du nom « hypnose » dénaturé par ces maléfiques prestidigitateurs de roulottes aux gros yeux et à la voix grave, manipulant les pauvres hères à coups de « Dormez, je le veux ! ». Brrr, j'en ai presque des frissons.


Démonstration d'hypnose de spectacle autour de 1900

Démonstration d'hypnose de spectacle autour de 1900


Si nous étions au XIXème siècle, voire même dans la première moitié du XXème siècle, je leur donnerais raison, en partie du moins. Mais nous sommes loin de cette époque. Nous avons survécu au bug de l'an 2000 et à la fin du monde en 2012, et il faut dire ce qui est : l'hypnothérapie se porte bien. Elle n'est toujours pas reconnue par l’État, certes, mais le nombre d'hypnothérapeutes ne cesse de croître de mois en mois. Aujourd'hui, nous sommes plusieurs milliers à offrir nos services en France et en Navarre. Contre combien d'hypnotiseurs de spectacle ? Une poignée, un détail, quelques dizaines tout au plus. Ridicule. Et pourtant notre horde de fiers hypnothérapeutes continue inlassablement de s'acharner contre ces quelques intermittents anecdotiques. Je n'aime pas spécialement Freud, mais il semblerait dans ce cas précis qu'il avait raison lorsqu'il disait que la volonté de tuer le père l'emporte sur le comportement rationnel…


En outre, les hypnotiseurs de spectacle d'aujourd'hui ne sont plus ceux des siècles derniers : lorsque Messmer – pour ne citer que le plus célèbre – présente un spectacle, il explique clairement au public la différence entre ce qu'il fait et la pratique de l'hypnothérapie. Il explique également que l'hypnose n'est pas un don que l'on reçoit du ciel, mais un savoir théorique et pratique que chacun peut acquérir à force de travail (Comme il le dit lui-même : « on peut tous apprendre à chanter, mais ce n'est pas pour autant que tout le monde chante bien ; c'est pareil pour l'hypnose »). Enfin, il démonte l'un des derniers mythes de l'hypnose en précisant à son public qu'il ne peut rien faire contre la volonté des personnes présentes au spectacle. L’hypnotiseur d'aujourd'hui ne prétend donc plus détenir un pouvoir surnaturel de contrôle absolu sur le public. Au contraire, il reconnaît que son travail est entièrement fondé sur une « complicité entre celui qui veut vivre cette expérience et celui qui lui fait vivre »*. Et ça marche tout aussi bien, voire même davantage, puisque le public est toujours au rendez-vous !


Soyons honnêtes : si l'hypnothérapie se développe aussi bien en France depuis quelques années et est de plus en plus reconnue, c'est bien grâce à la popularisation de l'hypnose par le spectacle, plus particulièrement encore depuis la « vague Messmer ». Pour quelqu'un qui n'a jamais été confronté à l'hypnose, il est très difficile d'y croire. J'ai moi-même été longtemps sceptique sur la question, rangeant les hypnothérapeutes dans le même sac que les marabouts et autres rebouteux de villages. Je n'ai pas cru aux premiers shows d'hypnose que j'ai vu à la télévision, c'était « trop énorme pour être vrai ». Puis, j'en ai vu d'autres ; les témoignages des participants m'ont paru sincères, j'ai peu à peu remarqué des similitudes de protocoles entre ces démonstrations et j'ai fini par me renseigner, puis m'instruire sur le sujet… On connaît la suite ! La démarche n'est guère différente pour la plupart des gens qui viennent aujourd'hui consulter un hypnothérapeute. C'est l'hypnose de spectacle qui leur a fait découvrir l'hypnose, qui leur a appris que nous avions tous cette faculté extraordinaire en nous et que si l'hypnose est si puissante qu'elle peut permettre à des inconnus, sur scène, de faire le poulet, de tomber amoureux d'un objet ou de se croire astronaute, alors c'est qu'elle doit aussi pouvoir servir à des choses bien plus utiles et plus profondes. Pour avoir permis à tant de gens cette découverte, nous – praticiens d'hypnose en cabinet - devons un immense « merci » à tous les hypnotiseurs de spectacle.


Il existe en outre un enseignement philosophique important dans l'hypnose de spectacle, que l'on a tendance à oublier : c'est que la vérité et même la réalité sont des choses somme toute très relatives [Et c'est d'ailleurs pour cette raison que l'hypnose a toujours été combattue par les grandes religions monothéistes, je reviendrai là dessus dans un prochain article]. Il arrive fréquemment que des gens se tuent en raison d'un chagrin d'amour, mais le feraient-ils si un hypnotiseur les avait fait tomber amoureux d'une chaise ou d'un rouleau de sopalin, leur montrant par là même que cet amour qu'ils croyaient absolu n'est tout compte fait qu'une construction virtuelle de leur cerveau (qui peut en changer en un claquement de doigt) ? De même, un timide maladif qui pense, fataliste, que sa timidité est une partie intégrante et inaltérable de sa personnalité peut pourtant, l'espace d'un instant, devenir « Batman, le sauveur de Gotham » et adopter le courage et le sentiment de puissance dudit super-héros. Comment peut-il continuer de voir sa timidité comme une absolue fatalité après cette expérience, puisque celle-ci lui a montré qu'il avait en lui des ressources qu'il pensait inexistantes jusque là ? L'hypnose de spectacle est par nature « spectaculaire » : elle ne peut ni ne veut soigner personne mais sa puissance « épiphanique » sur l'esprit est incontestable.


Enfin, j'aime personnellement l'hypnose de spectacle : la voir comme la pratiquer, que ce soit en salle, dans la rue ou entre amis. Elle fait partie de mon réenchantement quotidien du monde et me rend le cœur joyeux. Simplement l'écrire me fait sourire, car de nombreux souvenirs merveilleux remontent aussitôt à la surface, des souvenirs de fou-rires extraordinaires. Comme cette fois où ma compagne pensait être un guerrier viking sur le point de partir en expédition - et son air désespéré parce qu'elle ne retrouvait pas son épée et que le drakkar allait partir sans elle ! Ou encore ce type au bar qui devait se mettre au garde-à-vous à chaque fois qu'il entendait le mot « bière » sans comprendre pourquoi car je lui avais suggéré d'oublier la suggestion précédente. Et cette fille qui pensait « ne pas être réceptive à l'hypnose » ni à ma suggestion de « se prendre pour un schtroumpf » et qui m'avait répondu « Vous voyez bien que ça ne schtroumpfe pas sur moi ! ». Et des centaines d'autres moments hilarants comme ceux-là qui restent ancrés dans ma mémoire comme autant d'éclats de pur bonheur. Bref, cette hypnose là est très éloignée de ce que je pratique en cabinet mais, si on y réfléchit bien, n'a-t-elle pas quand même une certaine vertu thérapeutique ? Après tout, le rire est le premier traitement pour une vie épanouie.


Alors chers collègues hypnothérapeutes un peu vieux-jeu, un peu ronchons ou un peu frustrés de ne pas parvenir à faire faire le poulet à vos amis, prière de laisser tranquilles ceux qui savent le faire, voire même d'avoir un chouïa de reconnaissance envers eux ; après tout, ce sont eux qui remplissent nos cabinets.


Sur ce, mes amis, je vous laisse ; il y a Messmer qui passe à Tours ce soir et je ne voudrais pas rater ça ! Bonne soirée à tous et à bientôt pour d'autres articles...


Billet de spectacle pour l'hypnotiseur Messmer

*Messmer, source : http://lessor.fr/spectacle-entre-humour-et-motions-messmer-fascine-5762.html

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